Plus de 1 million de personnes ont défilé ce jeudi contre la réforme des retraites. La mobilisation a été importante, y compris dans des petites villes. Les syndicats appellent à une nouvelle journée d’actions le 31 janvier. Elisabeth Borne veut continuer « à débattre et à convaincre ».

L’unité, ça paie, ont dû se dire les leaders des huit syndicats français qui appelaient ce jeudi à une « journée de grèves et de manifestations » contre la réforme des retraites . La mobilisation a en effet été massive.
Selon la police, 1,12 million de personnes ont défilé dans toute la France (2 millions selon la CGT), globalement dans le calme, pour s’opposer notamment à la hausse de l’âge légal de retraite de 62 à 64 ans. Un niveau proche du maximum atteint le 12 octobre 2010 (1,23 million) au pic de la contestation contre la réforme Woerth qui avait porté l’âge de départ à la retraite de 60 à 62 ans.
Vers « un conflit dur »
« On est clairement sur une forte mobilisation, au-delà ce qu’on pensait », s’est félicité le numéro un de la CFDT, Laurent Berger, qui a défilé à Paris au côté de ses homologues, Philippe Martinez, de la CGT, Frédéric Souillot, de Force ouvrière, de François Hommeril, de la CFE-CGC, de Cyril Chabanier, de la CFTC, de Laurent Escure, de l’Unsa ainsi que de Murielle Guilbert et Simon Duteil, de Solidaires
Les organisations de salariés comptent bien réitérer ce succès : leurs numéros deux qui se sont réunis en fin de journée se sont mis d’accord sur un nouveau rendez-vous le mardi 31 janvier. D’ici là, « notamment autour du 23 janvier, jour de la présentation de la loi en Conseil des ministres », les syndicats « appellent à multiplier les actions et initiatives partout sur le territoire, dans les entreprises et les services, dans les lieux d’étude, y compris par la grève ». Et bien sûr à signer la pétition lancée le 11 janvier, qui avait recueilli ce jeudi soir près de 630.000 signaures.
Pour le leader de Force ouvrière, Frédéric Souillot, « on est parti pour un conflit dur » et « il faut bloquer l’économie ».
La jauge atteinte ce jeudi est au niveau des plus fortes mobilisations enregistrées sur ces trente dernières années. C’est bien plus qu’au démarrage du mouvement contre la réforme des retraites élaborée lors du premier quinquennat et finalement abandonnée à la suite de l’épidémie de Covid. Le 5 décembre 2019, le mouvement avait rassemblé 806.000 personnes selon le ministère de l’Intérieur.
Dans tout le territoire
Ce jeudi, 36.000 personnes ont défilé à Toulouse, 26.000 à Marseille, 25.000 à Nantes, 19.000 à Clermont-Ferrand, 15.000 à Montpellier ou encore 23.000 à Lyon, où la manifestation a été émaillée de quelques heurts entre forces de l’ordre et militants d’ultragauche…
Mais la mobilisation ne s’est pas limitée aux grandes villes. C’est une caractéristique forte, signe que le mécontentement irrigue le territoire. Dans de nombreuses villes moyennes, aussi, les défilés ont réuni beaucoup de monde, à l’image de Pau (13.600 manifestants), Angoulême (9.000), Châteauroux (8.000) ou Alès (7.200).
Une ambiance joyeuse
A Paris, où depuis 2016, les défilés ont été émaillés d’importantes violences, il y a eu quelques affrontements entre police et « black blocs » mais cela n’a pas empêché les manifestants de défiler de République à Nation. Ce qui a conduit certains à rebrousser chemin après des heures d’attente, c’est l’affluence. Pour y faire face, un itinéraire de délestage a été mis en place, rendant impossible le comptage du cabinet Occurrence pour plusieurs médias, dont « Les Echos ». La police a décompté 80.000 manifestants dans la capitale (400.000 pour la CGT), ce qui est en soi une affluence très importante. Avec des profils de tous âges, depuis les jeunes actifs jusqu’aux retraités, dans une ambiance bon enfant.
La Première ministre, Elisabeth Borne, a salué les « bonnes conditions » dans lesquelles se sont déroulées les manifestations, en promettant de continuer « à débattre et à convaincre ». Sur RTL, le ministre du Travail Olivier Dussopt a reconnu que la mobilisation « était importante. On savait qu’elle serait importante. Il est normal que le sujet des retraites suscite des inquiétudes, auxquelles il faut répondre », a-t-il ajouté.
Difficile de mesurer la proportion de salariés du privé dans les cortèges et plus globalement dans la mobilisation. Mais en tout cas à Paris, les salariés des entreprises publiques (massivement en grève au niveau national) ne s’étaient pas déplacés en très grand nombre contrairement à d’autres fois, ce qui n’a pas empêché un cortège fourni.
Du côté des fonctionnaires, les appels unitaires à la grève ont été très suivis parmi les agents de l’Etat, et en particulier les enseignants , même si le taux de grévistes y a été globalement un peu inférieur au 5 décembre 2019, à 29,5 % contre 33 % il y a trois ans. Dans les hôpitaux, le taux de grévistes a atteint un niveau équivalent, à 19,6 %. La fonction publique territoriale a connu, elle, un petit ressaut avec un taux de grévistes de 14,4 % contre 13,8 % en décembre 2019.
Source : les Echos